« Rêver au cabinet ».
Une invitation-incitation à la curiosité par Françoise et Paul Guilmot, Emmanuel d'Autreppe, Jacky Lecouturier. Objets trouvés et fantaisies, appareils anciens et images insolites, trouvailles anachroniques ou rencontres improbables, clins d’œil et chausse-trapes, émerveillements et détournements – ou comment attraper la rêverie photographique par le bout qu’on veut !
Jacqueline Roberts (France)
Jacqueline Roberts est née à Paris en 1969. Licenciée en Sciences politiques, elle travaille pour des organisations internationales avant de se lancer dans la photographie. Elle vit et travaille en Allemagne avec son mari Gareth et leurs enfants, Madoc, Malen et Emrys.
Les photographies de Jacqueline Roberts présentent des portraits intimistes, souvent mis en scène dans des décors naturels et « silencieux » ; un regard sur le monde de l’enfance, teinté de rêverie et d’émotion, qui n’est pas sans évoquer l’univers onirique des récits fondateurs ou des contes de fée. Lauréates de plusieurs prix, ses photographies ont fait la couverture de magazines photo, de livres ou encore d’albums de musique. Autodidacte, Jacqueline Roberts travaille principalement à la chambre grand format et privilégie les procédés photographiques anciens, artisanaux, ce qui contribue à donner à son approche une dimension « hors du temps ». Si les références n’en sont pas absentes (notamment aux grands noms de la photographie académique anglaise, ou des courants symbolistes et pictorialistes de la fin du XIXe siècle), leur qualité singulière et l’affirmation de certains choix esthétiques contribuent à leur donner leur caractère propre, tout à la fois en phase et en profond décalage avec les miroirs – ultratechnologiques – que nous tend, de l’enfance rêveuse, l’époque actuelle.
Anne Greuzat (France)
Après une licence en arts plastiques à l’Université d’Aix-en-Provence (2004), Anne Greuzat s’oriente vers la photographie à l’Université des arts et du design d’Helsinki, puis à l’École nationale supérieure de Photographie d’Arles. Elle a déjà montré son travail à Arles, Lyon, Lausanne, Vienne, Bruxelles…
Les images montrées à la Biennale font partie de sa série « Tempo Largo » :
Corps en suspension. Corps flottants.
Chute ou envol.
Légèreté ou profondeur.
Vide.
Aspiration vers l’idéal. Fuite de la réalité.
Plongeons dans l’oubli, vers un état de conscience antérieur.
Corps nu.
Abandon et grâce du geste.
Corps ramassé sur lui-même.
Calme. Silence. Blancheur.
Plonger dans cet état de demi-sommeil. S’échapper. Se perdre.
Se perdre à l’intérieur de soi.
Ou bien.
Se perdre dans la contemplation.
Comme s’absorber dans un paysage.
Tempo Largo, le titre de la série, suggère un mouvement lent propice à la contemplation, et fait référence à une œuvre du compositeur finlandais Jean Sibelius. Écho à la blancheur des corps et des paysages recouverts de neige, au silence du dormeur et aux sons assourdis des paysages enneigés. Calme apparent de ces êtres qui s’abandonnent au sommeil, ou d’une nature au repos.
« Il n’est pas d’état mélancolique sans cette ascension, sans une expansion vers les cimes, sans une élévation au-dessus du monde. Loin de celle qui anime l’orgueil ou le mépris, le désespoir ou le penchant effréné pour la négativité, cette ascension est issue d’une longue réflexion et d’une rêverie diffuse nées de la fatigue. S’il pousse à l’homme des ailes dans la mélancolie, ce n’est pas pour jouir du monde, mais pour être seul. Quel sens la solitude prend-elle dans la mélancolie? N’est-elle pas liée au sentiment de l’infini, intérieur comme extérieur ? » (Cioran, Sur les cimes du désespoir)
Anne Greuzat publie son premier ouvrage monographique, Tempo largo, chez Yellow Now (collection « Angles vifs »), à l’occasion de la Biennale.
Paul Nougé (Belgique, 1895-1967)
Scientifique de formation (il est biochimiste et accomplira toute sa carrière dans un laboratoire médical), Paul Nougé est un poète belge, considéré comme le théoricien du surréalisme en Belgique, mouvement auquel il adhère dès sa fondation en 1924. Cette année-là, il fonde la « revue-tract » Correspondance. Il multipliera ensuite les prises de position officielles sur l’art sous toutes ses formes, écrira des poèmes (détournant par exemple un manuel de grammaire ou le catalogue d’un marchand de fourrures), réalisera des photos et mettra sa plume au service de l’art de son ami René Magritte. Mais toujours, il rejettera la forme esthétisante de la poésie en particulier, de l’art en général. Pour lui, le poète doit recréer la réalité, la poésie est aussi une forme d’action. C’est pourquoi il se méfie de l’action politique pure, préférant la subversion par l’art.
« Subversion des images » : une série de photographies réalisées entre 1929 et 1930. Des hommes, des femmes y miment des actions étranges traitées dans un style purement descriptif. Ainsi, des balles de tailles décroissantes posées entre les bras d’une femme assoupie sur une table. La série ne sera publiée sous forme de livre qu’une quarantaine d’années plus tard, en 1968, par Marcel Mariën. La subversion ici mise en jeu reprend une donnée majeure du surréalisme : introduire du rêve, de l’imaginaire, du merveilleux dans la banalité du réel.
Extrait des actes du colloque « L’image comme stratégie : des usages du médium photographique dans le surréalisme » (Paris, 11/12/2009) :
Subversion des images
On reconnaît sur les photos plusieurs surréalistes belges dont Magritte, sa femme et Marthe Beauvoisin, la compagne de Nougé. Toutes les photos ont été prises par ce dernier, qui apparaît insidieusement deux fois sur les photos : dans le portrait posé sur le cadre (Le grenier) et dans le front bombé si caractéristique que l’on voit dans le miroir (Les profondeurs du sommeil).
Si on survole les clichés, on voit qu’il s’agit de mises en scène, d’une sorte d’installation en quelque sorte. Mise en scène essentiellement de l’absence. Absence d’objets : c’est le stylo qui manque ici (Les vendanges du sommeil), le centre de l’attention là (La naissance de l’objet), le portemanteau plus loin (Manteau suspendu dans le vide) ou encore les verres avec lesquels on trinque (Les buveurs). Mais l’absence peut être aussi plus métaphorique, seulement suggérée, comme dans le sommeil (Les profondeurs du sommeil, Les vendanges du sommeil), le fantôme (Linges et cloche) ou la mort (La jongleuse). Autre remarque qui peut être faite : le rôle important de l’écriture mis en avant [dans plusieurs de ces images]. De manière générale, il se dégage un sentiment d’étrangeté et de menace, mis en évidence par l’action ou l’expression des personnes, par le cadrage ou par quelque chose de plus sourd, de plus sournois (…).
Alors, pour celles et ceux qui sont familiers des tableaux de Magritte, les correspondances avec sa peinture sont évidentes. Par exemple, le tableau Les charmes du paysage (1928) ou encore ce Personnage méditant sur la folie (1928) ; deux tableaux contemporains de La subversion des images. Mais en réalité, les affinités sont d’ordre plus général comme en témoigne l’insistance de la place du miroir, la combinaison avec les mots et surtout les objets anodins – ciseaux et éponges – qui traversent les photos de l’un ou les tableaux de l’autre (Magritte, Les objets familiers, 1928, Fig. 5). Objets qui s’inscrivent dans la théorie des « objets bouleversants » développée par Nougé… (Frédéric Thomas, Université Paris VIII)
Karel Fonteyne (Belgique)
Le photographe flamand Karel Fonteyne est actif depuis plus de quarante ans dans le domaine de la mode, du portrait, d’une photographie d’auteur à la fois rusée, expérimentale, créative, intrigante, polysémique, où se lisent à la fois des références au surréalisme, aux incertitudes de la narration, à l’ambiguïté des mots et des intentions. Il a exposé à de multiples reprises en Belgique et à l’étranger, publié plusieurs livres et collaboré, depuis les années 70, à nombre de publications spécialisées de prestige ou internationales.
Texte de Marc Ruyters (L’Œil de la Photographie) :
Karel Fonteyne a bâti une œuvre personnelle puissante et remarquable. Ses photos sont d’une complexité extrême et on ne peut jamais se fier à sa première impression lorsqu’on les examine. Elles ne présentent quasiment aucune couleur primaire, affichant au contraire des teintes de brun, de gris et de vert, au sein d’une atmosphère chaque fois différente.
L’enchevêtrement subtil, l’emploi des couleurs, les sujets… On pourrait estimer que Fonteyne est un peintre-photographe. Car c’est à la façon d’un peintre qu’il traite tous les détails émanant d’une photo, d’un bout à l’autre du processus, aboutissant ainsi à des compositions uniques. Chacune d’entre elles est inattendue : il ne commet aucune évidence et s’abstient de toute réponse à une attente banale.
La femme et les hommes qui, chacun à sa façon, semblent se dissimuler en partie, détournent l’attention vers quelque chose qui est autre. Et cet autre ne se révèle pas de manière ordinaire. Cet autre est semblable au silence avant l’orage.
Ce sont des contes de silence, et comme il sied à de véritables contes de fées, ils intègrent le danger, l’aliénation et parfois même une blessure. Une photographie signée Karel Fonteyne n’est jamais ni gratuite, ni opportuniste, mais toujours lourde de sens et composée avec précision.
Marc Guillaume (Belgique)
Le photographe bruxellois Marc Guillaume déploie un travail de représentation fictionnel dont le sujet est le passage de la personne au personnage et la circulation entre le réel et la fiction. Pour parler de son travail, il crée le concept d’« Homo Fictionnis ».
Marc a notamment exposé à Bozar-Bruxelles, aux Brasseurs à Liège, à la galerie Bernard Bouche à Paris, au Musée des Beaux-Arts de Charleroi, à la galerie Rodolphe Janssen à Bruxelles.
Le Dictionnaire Piron des artistes belges dit à son propos : « Photographe. Dans la mouvance des photographes plasticiens, il interroge davantage le moyen dont il se sert que le modèle qui n’en est que le prétexte. »
La série des « Sous-Titres » (dont une partie est montrée à la Biennale) utilise le fragment narratif elliptique dans l’image pour faire brèche dans l’entendement et le rouvrir aux agents complexes du vivant tels que la mémoire, les affects, le politique, etc.
Xavier Istasse (Belgique)
« Cela fera bientôt trente ans que je me balade avec une caméra ou un appareil photo. Au départ chef opérateur et photographe autodidacte, j’ai toujours aimé la conception de films. La réalisation (de reportages et de documentaires principalement), souvent combinée à la prise de vue est aujourd’hui mon activité principale – tout en restant chef opérateur pour différentes sociétés de productions. Passionné par la photographie et par l’image sous toutes ses formes (illustration, cinéma d’animation, vidéo-art), je travaille également sur des créations scéniques (spectacles de danse, de théâtre) ou des créations libres, dans lesquelles j’aime explorer de nouvelles techniques et de nouvelles écritures. En outre j’ai le plaisir d’enseigner la pratique de prises de vues, du montage et de la réalisation à la Haute Ecole Albert Jacquard de Namur. Dans ce cadre j’accompagne également les étudiants dans l’élaboration de leurs travaux 2-D et 3-D. »
Praticien multiforme de l’image fixe et animée, enseignant, voyageur curieux et défricheur, Xavier Istasse propose, dans le cadre de la Biennale, un choix libre et inédit de petites bandes vidéo poétiques et contemplatives, réalisées en marge de ses pérégrinations, de ses commandes ou de ses reportages, et dans une grande indépendance de choix et de traitement, où la dimension sonore et musicale tient une place essentielle.
Sian Davey (Grande-Bretagne)
Sian Davey est photographe et psychothérapeute. Son sujet, c’est sa famille et principalement ses deux dernières filles, Alice et Martha. Avec une acuité saisissante et beaucoup de justesse, elle se saisit d’instants du quotidien qui disent les états d’âme et les doutes de ses enfants. Cette enquête intime se déroule dans le décor verdoyant du sud-ouest de l’Angleterre, dans le comté de Devon. Photographe depuis peu d’années, Sian Davey a été désignée lauréate du troisième prix Virginia dédié aux femmes.
[ vimeo.com/138523925 ]
La Biennale montre une sélection d’images de la série « Looking for Alice » dont parle ici Sian Davey :
Cette collection est une illustration de la vie de famille – toutes les tensions, les joies et les hauts et les bas qui vont avec le terrain familial. Ma famille constitue un microcosme pour la dynamique survenant dans plein d’autres familles. Nous ne sommes pas différents. En tant que psychothérapeute, j’ai entendu plein d’histoires. Il est intéressant que ce qui m’a été révélé après quinze années de pratique, n’est pas tant la façon dont nous sommes différents les uns des autres, mais plutôt la façon dont nous nous ressemblons en tant que race humaine. Ce qui est important est ce que nous partageons. Les histoires varient mais nous partageons tous les mêmes émotions. Nous sommes tous vulnérables aux sentiments de colère, de chagrin et de dépression. La liste est longue...
Ma fille Alice, née avec la trisomie 21, n’est pas différente des autres êtres humains. Elle ressent ce que vous et moi ressentons. Cependant nos sociétés n’admettent pas cela, et son existence même a très peu de valeur ou pas du tout. Alice est entrée dans un monde où le test de dépistage génétique à douze semaines de gestation est entièrement tourné vers la prévention plutôt que vers la préparation à la naissance. Tandis que nous prenons en privé notre décision, l’effet sur notre société est que 92 % des bébés atteints du syndrome de Down sont sacrifiés au cours de l’étape du dépistage prénatal. En fait, jusqu’à l’introduction du dépistage, les enfants tels qu’Alice étaient gravement marginalisés et médicalisés et on leur octroyait peu de soins médicaux, voire pas du tout.
J’ai été profondément choquée quand Alice a été identifiée à la naissance en tant que « bébé imparfait ». Ce n’était pas ce à quoi je m’attendais. Nos premières expériences à l’hôpital ont peu contribué à ce qu’il en soit autrement. La pédiatre repoussait ses jambes en arrière, enfonçait ses pouces dans l’aine d’Alice, et elle nous annonça rapidement que nous devrions ramener Alice à la maison et la considérer comme n’importe quel autre bébé. Mais Alice ne se sentait pas comme n’importe quel autre bébé, et j’étais pleine d’anxiété, ce qui eut des répercussions sur chaque aspect de ma relation avec elle. Mes angoisses infiltraient mes rêves. Je rêvais qu’Alice était emmaillotée dans une couverture et que j’avais complètement oublié tout ce qui la concernait. Je défaisais le paquet serré où elle était nichée pour la nourrir, et je découvrais alors qu’elle était couverte d’un liquide blanchâtre – un liquide de négligence... et alors j’étais incapable de la nourrir, incapable de répondre à ses besoins élémentaires.
Réflexion faite, je voyais qu’Alice ressentait mon rejet, et cela me causa davantage de souffrance. Je sentais bien que la responsabilité m’en incombait. J’ai dû chercher au plus profond de mes propres préjugés et braquer le projecteur dessus. Le résultat fut qu’au fur et à mesure que ma peur se dissipait, je tombai amoureuse de ma fille. Et ce fut pareil pour nous tous.
Ce projet est donc sur ma relation avec ma fille Alice et sur sa place au sein de sa famille.
Ce projet est dédié à Alice.
À lire également : un article de Sophie Bernard dans L’Œil de la Photographie (www.loeildelaphotographie.com).
Les photos réalisées par les stagiaires du stage photo pour adolescents animé par Sarah Joveneau et François Struys.
Marie Moroni (France)
Scénographe plasticienne depuis plus de 15 ans, Marie Moroni a toujours travaillé autour de l’image. En 2015, elle a décidé de se consacrer entièrement à la photographie.
Suite à deux voyages au Rwanda en 2015 et 2016 pour des commandes de reportages, le portrait s’est imposé à elle, le besoin de la rencontre avec l’humain et l’intime.
La série présentée à la Biennale s’intitule « Ibaba » :
« Qui sont ces femmes ? Je ne connais que très peu d’elles, seulement leur histoire commune : celle du Rwanda. Je les ai rencontrées dans un petit village au milieu des collines au nord de Kigali, dans l’atelier de broderie où elles se sont remises au travail après dix-neuf ans d’interruption suite au génocide. Ma série IBABA y est née... une rencontre intime et muette. J’ai été touchée par ce qu’elles ont accepté de me laisser entrevoir, à moi l’étrangère qui ne parle pas leur langue. Elles et moi, nous nous observons. » (M. Moroni, Rutongo, Rwanda 2016)
Dans un échange par mail ultérieur, Marie précise :
La rencontre avec ces femmes a été « magique »! Il y a de nombreuses manières d’aborder le thème du rêve. Je pense que ces femmes rêvent : rêvent dans le sens de désirer vivement, de souhaiter, d’espérer. Avant 1994, et cela pendant plus de vingt ans, le rêve de chacune des jeunes filles du Nord de Kigali était d’intégrer l’atelier de broderie de la communauté belge des Sœurs de la Visitation. Là, elles gagnaient très bien leur vie et pouvaient « rêver d’une vie meilleure » pour elles, et leur famille future. Mais le génocide a détruit en même temps que leur pays, tout leur rêve. « J’ai prié pour la réouverture de l’atelier, tous les jours », m’a confié une femme du village … et un jour ce rêve est devenu réalité, dix-neuf ans plus tard. Vingt-huit brodeuses y travaillent aujourd’hui. Dancilla témoigne : « Après la guerre, c’était la pauvreté. Nous n’avions pas d’argent. Aujourd’hui, mes filles sont fières de moi. Mon rêve serait qu’elles intègrent à leur tour, un jour, l’atelier. » Le rêve continue…
Jean-François Flamey (Belgique)
« Avec une culture visuelle nourrie depuis tout gamin par les pochettes des disques plus nombreux à la maison que les livres ; une fois en âge d’assumer mon besoin d’expression, cela s’est tout naturellement matérialisé par des va-et-vient entre l’utilisation du son et celle de la photographie. L’immédiateté de l’acte photographique et sa grande force de résurgence des moments vécus ont opéré sur moi et sont devenus prioritaires sur le travail du son, sans lui tourner le dos pour autant.
Autodidacte, isolé dans mon propre enseignement et gratifié par la seule complaisance de mon entourage direct, l’image photographique était presque devenue une fin en soi au lieu de la conséquence d’un choix. La rencontre en 2005 avec le photographe Olivier Calicis fut un tournant marquant. Non pas que j’aie suivi des cours avec lui, mais de longs échanges complétés par de nombreuses lectures m’ont permis une immersion dans les codes de l’image avec comme effet d’appréhender autrement la photographie, d’en mesurer la richesse du langage.
Que ce soit en numérique, en argentique ou au Polaroid, je m’oriente sur le hors-champ, sur ce qui nous échappe lorsque l’on est confronté à une image. La construction mentale du spectateur est quelque chose d’important pour moi, puisse-t-il compléter mes images souvent construites dans des lumières faibles, parfois sans préoccupation de la mise au point.
Depuis peu, une tension m’est apparue entre l’envie initiale et celle de plus en plus grandissante de désacraliser les images et d’accorder de l’importance au support, de faire parler la matière autant que la représentation de son contenu. » (JF.F., 02/2017)
Travail présenté lors de la Biennale de photographie en Condroz.
Des noirs et blancs, des dégradés de gris, des couleurs passées à la machine à laver avec une poudre de mauvaise qualité. Tout comme dans notre quotidien ou dans nos rêves, il y a des ratés. Ici ils sont assumés, voire provoqués avant de s’imposer sur le papier. Photos numériques, argentiques ou Polaroid, certaines sont livrées à l’état brut, d’autres sont imprimées, rephotographiées ou scannées, réimprimées et manipulées à la main pour repartir dans la boucle avant d’être juxtaposées sans réel lien apparent entre elles, si ce n’est celui que vous allez créer à partir de votre imaginaire. Tel est le parti-pris de Jean-François Flamey, autodidacte qui pratique la photographie depuis le début des années deux mille.
Jean-François Flamey publie chez Yellow Now (collection « Angles vifs »), à l’occasion de la Biennale, son premier ouvrage monographique.
Didier Bizet (France)
Didier Bizet est photographe et directeur artistique. Après un diplôme des Beaux-Arts, il se consacre au graphisme et décide, à la Révolution de velours, de s’installer à Prague, ville du renouveau et de Vaclav Havel. Bien plus tard, lors d’un voyage à bord du Transsibérien, il se lance dans la photographie.
La mélancolie du voyage déclenche un certain point de vue pour ses choix photographiques. La Russie est pour lui un des derniers pays où la nostalgie et la mélancolie sont sensiblement visibles. Sa fascination pour le post-communisme l’emmène en Corée du nord, puis en Erythrée, et de nouveau en Russie. La Palestine et la Bosnie sont également pour lui des passages importants. La photographie pour lui est un vrai apprentissage de l’environnement, elle facilite et parfois donne des réponses à ses propres questionnements, elle n’est pas que plaisante mais aussi nécessaire dans une expérience de vie.
Didier Bizet est membre du studio Hans Lucas depuis 2015.
À propos de sa série « Pyongyang Paris » présentée à la Biennale, voici ce que Didier Bizet écrit :
Spectacle gigantesque à l’échelle de tout un pays, mis en scène par la dictature pour les touristes, la Corée du Nord offre continuellement les mêmes images. Témoigner sur place avec objectivité est chose quasi impossible. Le touriste, comme le journaliste, est orienté pour capter des images selon des angles bien particuliers, mais surtout selon un scénario écrit et interprété par des « acteurs ». Cette série photographique est elle aussi une fiction, elle n’a pas vocation de témoignage littéral. Elle est la suite de ce « récit » photographique que j’ai rapporté de mon voyage à Pyongyang en 2012. Mes images de Pyongyang-Paris montrent une réalité qui s’entremêle avec une fable moderne. J’ai réglé ma mise en scène avec ce touriste nord-coréen tel que mes guides ont gentiment organisé la leur à Pyongyang. Mes images s’entrecroisent entre Pyongyang et Paris : un va-et-vient qui s’organise autour d’un parallèle fictif. Ce Nord-Coréen si désuet découvre également un Paris "cliché" qui lui rappelle à son insu que l’échappatoire est impossible. Ce parallèle me permet d’essayer de comprendre ce qui nous est caché en Corée du Nord. Quel est le réel quotidien de ces acteurs, que se passe-t-il en coulisse ? »
Didier montre également quelques grandes images de sa série « Itinéraire d’une mélancolie » (Russie, 2011-2014), de laquelle il dit : « Continent à part entière et pays multi-ethnique où l’on parle plus de cent langues, ni occidentale, ni entièrement slave, la Russie intrigue et fascine. Derrière les cartes postales des bulbes dorés, la vodka festive et l’âme "introuvable" qui vous ramène à chaque fois dans ce pays, la Russie échappe à tout étranger. (…) J’ai constaté une Russie mélancolique, chaotique, grinçante et qui semble abandonnée dès les abords de Moscou. La Russie est pour moi un des derniers pays où la nostalgie et la mélancolie sont sensiblement visibles. »
Valérie Callewaert
Projection d'images proposées par des photographes amateurs et professionnels (appel à propositions).
Anne-Sophie Costenoble (Belgique)
« La photographie m’invite à être attentive, à jouer avec le sensible, le hasard et l’opaque.
Comme les mots sur les pages d’un livre, les images se mettent à vivre leur propre vie.
L’écho est gardé au fond du coeur. »
Après des études de kinésithérapie et d’histoire de l’art, Anne-Sophie Costenoble aborde la pratique photographique lentement en découvrant le monde. La fréquentation d’ateliers de photographie, les rencontres avec des personnalités comme Jean-François Spricigo et Nicolas Van Brande amènent son travail à prendre une forme narrative et poétique. Depuis lors, elle explore l’écriture photographique au travers de fictions intimes et de projets collaboratifs en Belgique ou ailleurs.
Ses photographies ont été exposées en Belgique, notamment au Musée de la photographie à Charleroi et à l’Espace Contretype à Bruxelles, mais également en France dans le cadre du Festival Circulation(s) avec le collectif Caravane, lors du festival Itinéraires des Photographes Voyageurs à Bordeaux, des Transphotographiques de Lille, à Arles, et projetées au Bal à Paris. Ses travaux ont été présentés dans divers pays d’Europe ainsi qu’au Mali (Rencontres de Bamako 2007).
Une exposition est prévue à l'automne au Musée de la Photographie à Charleroi. Le livre « l'heure bleue » accompagnera l'exposition. Elle est représentée par la 44 Gallery.
Un alphabet de secrets (texte de Xavier Canonne, mai 2016, extr.) :
Sans doute convient-il de revenir à l’enfance, « aux sources vives de l’enfance » comme les nomme magnifiquement André Breton, pour retrouver semblable faculté d’observation.
L’enfant rêveur, l’enfant morose, l’enfant puni savent mieux que quiconque s’absorber dans le détail qui verra le temps glisser sur eux sans les distraire, tout entiers livrés à cette image obsédante qui les imprègnera durablement, qu’un parfum, une phrase, le souvenir persistant d’un songe au réveil viendront longtemps après restituer.
L’adulte, lorsqu’il est Anne-Sophie Costenoble, a su conserver intacte cette concentration qui voit le temps se suspendre à la faveur d’un détail, en un entretemps durable. Il y a dans ces photographies le bruissement d’une forêt à l’aurore, des draps froissés, la paume glissant au souvenir d’un corps aimé, les plis d’un rideau ou d’une aisselle ; il y a des chevelures, des algues, des plumes, des écailles, le tain fatigué d’un miroir comme des rides éternelles. Il y a la beauté des femmes, un sexe à peine masqué, une épaule offerte, des lèvres entrouvertes. Peut-être s’y trouve-t-il aussi le souvenir de gravures anciennes, la forêt de Brocéliande ou celle de Gustave Doré où un enfant égaré sème des petits cailloux blancs.
Chaque image d’Anne-Sophie Costenoble est un poème, une eau tiède où se laisser glisser, sans peur ni remous pour ne pas déranger ce qui affleure à sa surface ; une photographie méditative qui a fait le pacte du silence, une photographie « primitive » - j’y mets les guillemets nécessaires -, chacune d’entre elles semblant contenir une part de l’ordre du monde puisque tous les éléments y sont contenus et les sens conviés.
Alexandra Demenkova (Russie/Israël)
« La photographie me fait réfléchir à la fragilité de ce monde de relative stabilité créé dans le cercle de nos familles, à quel point est mince la frontière entre la santé, à la fois mentale et physique, et la maladie ; la normalité de la vie quotidienne et la misère ; l’espoir et la détresse ; la liberté et une vie de perpétuelle réclusion. »
Alexandra Demenkova est née en 1980 en Russie. Elle est diplômée de l’Université de Saint-Pétersbourg et est lauréate de plusieurs prix, dont celui de meilleure photographe de presse (Saint-Pétersbourg 2006). Suite à cette reconnaissance, cette jeune photographe a exposé son travail en Allemagne, en Espagne, en France (Rencontres d’Arles), en Norvège, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, au Canada, en Chine, au Japon… Alexandra Demenkova est une des photographes émergentes de la scène artistique russe et a exposé notamment au MMOMA (Museum of Modern Art) de Moscou et au Musée de la photographie de Saint-Pétersbourg. Différents livres concernant son travail photographique ont été publiés : « Land. Country life in the urban age », « Future images », « This day of change ».
« Territory of broken dreams » : cette série photographique explore les périphéries russes, ces villages restés presque en marge de l’histoire et des évolutions récentes de la Fédération de Russie.
« Pour de nombreux résidents de grandes villes russes, comme Moscou ou Saint-Pétersbourg, la campagne n’existe tout simplement pas. Il est vrai qu’il faut voyager bien loin hors de ces métropoles pour trouver des villages en perdition où vivent en majorité des personnes âgées réduites à une grande pauvreté. Ce sont d’anciens paysans des fermes d’État, les vieux et les chômeurs qui ont échoué dans ces villages autrefois vivants. Vous y trouvez rarement quelques enfants ; les services publics ont fermé, et l’esprit communautaire a fait place à la solitude, à l’alcoolisme, et au crime. Vous pourriez vous sentir triste pour les gens qui vivent dans ces conditions, sans espoir de remédier à leur pauvreté, mais vous serez heureux d’apprendre que ce genre d’endroits existent quand vous verrez que les personnes qui vivent là se donnent à eux et à leurs enfants toute l’attention et la chaleur humaine dont ils sont capables, au lieu d’avoir des ordinateurs comme leurs meilleurs amis et d’à peine se parler comme nous le faisons souvent. »
Exposition « Le sens du détail » proposée par la Société libre d'Émulation de Liège en collaboration avec l'ESA Saint-Luc de Liège et la Biennale de photographie en Condroz.
« Dans bien des domaines de l'activité humaine, qu'elle soit vue sous l'angle artistique ou non, le détail fait souvent sens. C’est particulièrement le cas en matière de capture d'image photographique.
Qu'il soit voulu ou fortuit, ce « petit plus » donne une orientation complémentaire à la lecture de l'œuvre. Mais il peut aussi en changer la donne par l'induction d'autres significations, voire être vecteur d'une transformation radicale de l'intention première du photographe. Il peut devenir propagandiste, provoquer le rire par son côté saugrenu ou l'angoisse par sa touche décalée, et même la zizanie s'il est mal interprété. Il peut aussi représenter un tout. Bref, rien n'est plus important qu'un détail, surtout s'il est révélateur !
Dans la mise en scène de certaines photographies, un détail est parfois mis en vedette grâce aux logiciels adéquats. D’autres fois, c'est lors du tirage que cet élément particulier apparait. Le choix du format final joue également un rôle indéniable, sans parler du lieu d'exposition ou du support de publication.
S'il n'est pas nécessaire que le détail soit discret, il peut aussi requérir une certaine attention pour être discerné. Celui qui regarde fait alors partie du processus créatif, sans que cela ne s'apparente pour autant au jeu des 7 erreurs !
A contrario, il est communément admis que trop de détails nuit. On mesure alors mieux la différence entre le détail au singulier et les détails au pluriel, qui peuvent être perçus comme anecdotiques ou superflus, quand ils ne brouillent pas carrément les pistes ! »
Anne-Françoise Lemaire, coordinatrice à la Société Libre d'Émulation de liège.
Les livres et photos réalisés par les stagiaires d'un atelier résidentiel d'une semaine animé par Alexandre Christiaens et Emmanuel De Meulemeester.
Projection d'images proposées par des photographes amateurs et professionnels (appel à propositions).
Baudoin Lotin (Belgique)
Jean-Marc Bodson (à propos de l’exposition « Géographie humaine » de Baudoin Lotin) :
Les photographies de Baudoin Lotin sont résolument du côté de la géographie. Ce qu’elles nous montrent est hors temps parce qu’elles ne retiennent de celui-ci que le court instant qui rend les choses à leur poésie immuable. Hors temps, mais pas hors sol car ce qu’on y voit tire tout son sens d’un territoire repérable et repéré. Ici le Mexique où il se rend régulièrement depuis plus d’une trentaine d’années. Là, le Congo des grands lacs ou encore la Roumanie du Maramures. Ce n’est dès lors pas un hasard si l’on pense ici au grand photographe et cinéaste Paul Strand. Moins par le fait qu’il ait lui aussi longtemps travaillé dans ces mêmes régions de la planète que par le fait qu’il soit passé dans son art de l’histoire à la géographie. (…)
Dès ses premiers voyages, Baudoin Lotin inscrivit son travail dans cette manière de regarder le monde à une distance sage qui fut celle du Strand de l’âge mûr. Mais d’emblée il pimenta cette sagesse d’un grain de folie visuelle. C’est ce qui fait que sa géographie n’a rien de figé. Bien au contraire elle emprunte ses formes aux mouvements de la vie, au hasard du moment qui passe. Son Mexique définit d’ailleurs plus une géographie d’itinérance – on the road, génération oblige – proche de celle d’un Bernard Plossu. Néanmoins, il s’agit-là d’une itinérance des voies de traverse dans l’image même plutôt que celle du voyage et des grands chemins.
Constamment, Lotin nous rappelle qu’il y a toujours moyen de voir les choses autrement. Sa façon de cadrer dénote clairement la volonté de se démarquer du lieu commun et des considérations générales. La géographie humaine chez lui n’a rien à voir avec une stéréotypie humaniste ou avec la nostalgie du temps révolu, mais bien avec la magie de la rencontre. (…) Ses portraits relèvent de la prise de vue instantanée, de l’instant fugace plutôt que la pose statufiante. Ils témoignent surtout d’une expérience partagée.
(…) De telles images – et c’est remarquable – nous font passer de la géographie humaine à une géographie à hauteur d’homme. Mieux encore, à une topographie de la rencontre humaine. Celle-là même qui est au cœur de la pratique de la photographie telle que Baudoin Lotin la conçoit. (Jean-Marc Bodson)
Photographe voyageur, arpenteur de l’humain dans sa diversité, Baudoin Lotin pratique un noir et blanc argentique d’un apparent classicisme, mais en constant renouvellement dans son approche et son expérience de la nouveauté (du lieu, de la rencontre, d’un état d’esprit), et de par sa sensibilité au détail. S’il a constitué au fil des ans des séries remarquables de cohérence, qui ont donné lieu à la publication de plusieurs livres (notamment sur le Mexique), il propose à l’occasion de la Biennale un voyage « transversal » à travers près de 40 années de photographie : un voyage rêveur, un voyage imaginaire…
Alexandre Christiaens (Belgique)
« Mon axe principal est de mélanger ma collecte photographique, qui se réalise parfois de façon appliquée et réfléchie, parfois de façon hasardeuse. Ensuite, il s’agit de rassembler mes images et d’en écrire une histoire. Non pas la mienne, car même si je ne m’en exclus pas, mon travail n’est pas du tout autobiographique ; ce sont plutôt des histoires du monde, des histoires de vies, de territoires, de formes, d’horizons et de regards portés que l’image raconte. »
Texte d’Emmanuel d’Autreppe (pour le site « Democratic Jungle ») :
Photographe libre et indépendant, inclassable et sinueux, Alexandre Christiaens met en rapport des territoires, des lieux, des formes, de l’aléatoire et de l’humain – tantôt présent, tantôt suggéré –, dans un savant dosage, une intense confrontation d’ordre et de désordre. Tout se joue dans la dualité de densité de la matière et de légèreté des airs, d’obscurité et de lumière, ou encore, de profonds silences opposés à l’activité frénétique des hommes et des machines. C’est un explorateur de notre temps mais hors du temps : en équilibre en marge de la photographie dominante, aux marges du monde, au bord du cadre comme au bord de l’eau…
Alexandre Christiaens est né à Bruxelles en 1962. Il vit et travaille à Dave, près de Namur (Belgique). Autodidacte en photographie pour l’essentiel, il est avant tout un passionné de voyages et de la mer. En 1999, il effectuait une série de séjours entre l’Ile de Wight, Portsmouth, Ostende, Venise, Calais, Douvres et la Côte d’Opale, utilisant divers appareils argentiques pour fixer sur pellicule une série d’impressions photographiques qu’il intitulera « Marines ». Ce sera le début d’une nouvelle orientation artistique, à laquelle il se consacre depuis lors pleinement.
Alexandre Christiaens entreprend ensuite des périples photographiques dans le monde entier (Grèce, Inde, Brésil, Russie, Chine…), à la recherche des réseaux portuaires, des villes et des mégapoles en prise directe avec les mers et les océans, traquant la matière, de face, aussi bien que les à-côtés de la mondialisation. Mais ses expérimentations sur l’impression en noir et blanc le poussent à s’intéresser, dans le même temps, au rendu des roches et des concrétions : en 2007, il réalise la série « Grotesques, concrétions et paysages », qui alterne des paysages solaires et des images réalisées avec une petite quantité de lumière dans les entrailles de la terre.
« Les déambulations passagères d’un voyageur débordé du monde » : c’est ainsi que le photographe, pour qui le déplacement vers des destinations lointaines est la condition essentielle pour créer, résume l’histoire de ses photographies. En Roumanie, en Estonie, en Russie, en Inde, au Brésil, au Chili tout récemment, en Turquie, en Chine ou au milieu de l’océan Atlantique, il s’agit pour lui de se frotter au monde, d’interroger sa structure, de traquer la présence ou de sonder les absences, d’enregistrer d’un même tenant les vibrations de l’histoire (y compris et avant tout celle des vieilles pierres, qu’il confronte volontiers à la mer) et celles de la lumière. Entre ses différentes séries photographiques (paysages industriels, grottes, fronts de mer, marines, …) se créent des liens qui tissent une vision sensible et aiguë du monde, attentive tout autant au changement extérieur qu’aux déplacements incessants de la conscience intérieure. Les photographies qu’Alexandre Christiaens ramène de ses voyages nous parlent autant du globe qu’il parcourt, que d’un monde intérieur qui transparaît en filigrane, se mélange et se superpose à ses clichés. Dans un second temps, il aime considérer les images glanées comme des matières nouvelles et autonomes, expérimentant les nouveaux discours ou les nouvelles approches qui peuvent surgir de leur rencontre, de leur juxtaposition – car s’il arrive à son regard d’être inquiet ou mélancolique, son rapport aux images demeure joyeux et tonique.
La singularité de sa pratique lui a valu peu à peu une large reconnaissance : nombreuses expositions en Belgique et à l’étranger, publication à ce jour de deux ouvrages monographiques (« Eaux vives, peaux mortes » chez Yellow Now en 2012, et « Estonia », en collaboration avec Carl Havelange, aux Impressions nouvelles en 2015), participation à de nombreuses manifestations collectives, etc. Il anime aussi de nombreux ateliers et pratique régulièrement des activités d’enseignement, sans pour autant que son travail cède aux facilités ou aux conventions des modes ou de l’esprit du temps.
Mission photographique à Marchin et Tahier confiée à LaKabane, collectif de photographes liégeois
« LaKabane est un groupe de photographes amateurs issu du Centre d’expression et de créativité Mosaïque, logé dans le quartier Saint-Gilles à Liège.
Postée discrètement au fond de nos jardins ou perchée plus ostensiblement dans un arbre, LaKabane est avant tout un repère d’explorations libres et un point de vue d’où contempler le monde qui nous entoure.
À travers une pratique nomade, avec l’envie de chemins détournés et de bricolages astucieux, chacun y construit sa démarche photographique.
Nos images font sens et sont reliées à des rencontres, des réflexions ou des recherches. Nos photographies se connectent à l’humain et son impact sur le réel.
Éclectique et formé de membres venant d’horizons différents, le collectif est constitué de : Catherine Beine, Julien Bebronne, Marino Carnevale, Murielle Heynen, Benoit Riccadonna, Annick Toussaint. »
Nick Hannes (Belgique)
Il vit à Ranst, un village près d’Anvers, la ville qui l’a vu naître en 1974. Nick Hannes enseigne la photographie à l’école d’Arts de Gand et mène des projets à long terme qui font l’objet de grandes expositions et de livres. Le dernier, Mediterranean, The Continuity of Man, est paru à l’automne 2014 aux éditions Hannibal : vingt pays traversés, des milliers de kilomètres au long des rivages de la Méditerranée, de Gibraltar à Beyrouth, de Tripoli à Palerme... Pendant quatre ans, le photographe a effectué un grand tour pour découvrir la destinée de celle que les Romains surnommaient Mare Nostrum. Infiltré dans les cocktails monégasques ou les nuits branchées d’Ibiza, témoin du sort des migrants échoués sur l’île de Lampedusa ou des gamins pieds nus dans la poussière de Gaza, il dresse le portrait sans complaisance d’une Grande Bleue malmenée, chahutée mais toujours magnifique, diverse et plus vivante que jamais.
Lauréat de nombreux prix de photojournalisme, Nick Hannes est représenté par l’agence Cosmos. Après avoir déjà montré, il y a quelques éditions, des extraits de son travail sur les républiques d’ex-Union soviétique, Nick Hannes a réservé à l’édition 2017 de la Biennale quelques images de son travail, à peine achevé, sur Dubaï et les Emirats arabes unis : série à la fois plasticienne, citoyenne et documentaire, qui pose avec vertige et parfois jusqu’à l’absurde certains des enjeux les plus prégnants et les plus déstabilisants de la mondialisation, du choc des cultures, ou de l’avenir durable de nos modes de vie…